POLITIQUEAffaire Claude Guéant: Les fonds spéciaux ont toujours existé à l’Intérieur et à la Défense

Affaire Claude Guéant: Les fonds spéciaux ont toujours existé à l’Intérieur et à la Défense

POLITIQUEL’ex-ministre a remis en lumière la pratique des fonds spéciaux. Explications...
Paris le 25 avril 2012. Interview de Claude Gueant ministre de l'interieur dans son bureau place Beauvau.
Paris le 25 avril 2012. Interview de Claude Gueant ministre de l'interieur dans son bureau place Beauvau. - A. GELEBART / 20 MINUTES
Romain Lescurieux

Romain Lescurieux

Les fonds spéciaux, qu’est-ce que c’est?

Les fonds spéciaux ou «fonds secrets» existent depuis le 19ème siècle note Le Renseignement français contemporain sous la direction de Bertrand Warusfel (L’Harmattan). Mais sont fixés juridiquement par la loi du 27 avril 1946. Le chef du gouvernent devient le seul maître de ses dépenses et les distribue aux différents ministères intéressés.

Combien cela représente-t-il?

Les fonds spéciaux se répartissent en fait entre le gouvernement et la DGSE. En 2001, pour la dernière année d’existence des fonds spéciaux le Parlement vote un budget de «393 millions de francs», selon un article de Libération datant de 2001 «234 millions sont alloués à la DGSE et 159 au gouvernement» d’après le quotidien. Chaque ministre et secrétaire d'Etat recevrait ainsi une somme aux alentours de 131.000 francs par mois.

Quand le système des fonds spéciaux s’est-il arrêté?

En 2002, la loi de finance réforme en profondeur les fonds spéciaux, à la suite de de nombreux scandales. Notamment lorsque Jacques Chirac est mis en cause pour des voyages privés, effectués entre 1992 et 1995 et payés en liquide. Ils sont remplacés par des virements bancaires classiques et licites. Mais de manière exceptionnelle, les fonds spéciaux perdurent toutefois au ministère de l’Intérieur et de la Défense.

Pourquoi ce système a-t-il continué au sein du ministère de l’Intérieur et de la Défense?

A partir de cette réforme, l’objet exclusif des fonds spéciaux devient le financent d’actions liées aux services de renseignement, au contre-espionnage, à la sécurité intérieure et extérieure de la France. «Afin de servir ses missions, la DGSE devient le principal bénéficiaire de cet argent versé en liquide», assure René Galy Dejean, président de la commission de vérification des fonds spéciaux de 2002 à 2007.

Est-ce terminé aujourd’hui?

En 2002, «quand je suis arrivé au ministère de l’Intérieur, il y avait plus de 400 personnes concernées par ces primes dont le régime fiscal n'était pas défini. J'ai d'ailleurs remis le système à plat pour mettre fin à ces pratiques en 2006», explique Claude Guéant. Mais en regardant de plus près le rapport de Marie Christine Dalloz sur le projet de loi de finance 2013 les crédits de fonds spéciaux sont encore d’actualité au ministère de la Défense et à l’Intérieur.

A qui les fonds spéciaux sont alors destinés?

Les crédits des fonds spéciaux sont ainsi répartis: à la direction générale de la Sécurité extérieure (DGSE) 55.426.370 euros, au groupement interministériel de contrôle (GIC) 8.600.000 euros, à la direction centrale du Renseignement intérieur (DCRI) 800.000 euros, à la direction du Renseignement militaire (DRM) 60.000 euros, à la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières (DNRED) 15.000 euros, à la direction de la Protection et de la sécurité de la défense (DPSD) 80.000 euros, à la cellule Tracfin 20.000 euros. Il est également mentionné dans ce rapport que 40.000 euros sont destinés au Cabinet.

Existe-t-il une commission de vérification ou de contrôle des fonds spéciaux?

Oui, encadrée par l'article 154 de la loi de finances de 2002, la commission de vérification des fonds spéciaux est chargée de s'assurer que ces crédits «sont utilisés conformément à la destination qui leur a été assignée par la loi de finances»

Qui sont ses membres?

La commission de vérification des fonds spéciaux se compose de deux députés, dont le président de la commission, désignés par le président de l'Assemblée nationale; de deux sénateurs, désignés par le président du Sénat et de deux membres de la Cour des comptes nommés par décret. De 2002 à 2007, durant les années qui concernent les «primes de cabinet» dont parle Claude Guéant, le président de cette commission est René Galy Dejean (UMP). Cet ancien trésorier d’Edouard Balladur durant la campagne de 1995 explique: «Nous vérifions comment les services concernés utilisés cet argent versé par Matignon […] en aucun cas nous contrôlions les ministères en eux même. Ce n’était pas notre mission» conclut-il.