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France

Attentat de Nice : la violente charge de Guéant contre Hollande et Valls

Après le drame de Nice, l’ancien ministre de l’Intérieur Claude Guéant juge sévèrement l’action du gouvernement en matière de lutte contre le terrorisme. Il défend la suppression des renseignements généraux décidée par Nicolas Sarkozy en 2008.
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Claude Guéant
Dans une interview accordée à Challenges, au lendemain de l'attentat de Nice, Claude Guéant défend sa réforme des services de renseignement intervenue en 2008.
Thomas Samson/Afp

Après ce nouvel attentat à Nice, quelles mesures de sécurité devraient prendre le gouvernement ?

Dans la lutte contre le terrorisme, le «risque zéro» n’existe pas. Il n’y a pas de mesure qui constitue une parade à coup sûr contre tout attentat. D’autant que les responsables de l’Etat islamique appellent leurs partisans à frapper la France par tous les moyens : fusillade, bombe, attaque à l’arme blanche, voitures béliers et même jet depuis des précipices… La menace est de plus très diffuse entre, d’une part, des correspondants directs de Daech et, d’autre part, des initiatives isolées. Il ne suffit pas de démanteler un réseau de terroristes. A mon sens, le gouvernement tarde néanmoins à prendre quelques mesures importantes.

Lesquelles ?

La collaboration entre les pays européens doit d’abord être renforcée. Il est invraisemblable qu’il n’existe toujours pas un fichier commun des personnes suspectées d’être liées au terrorisme en Europe. Un tel fichier, qui pourrait s’appuyer sur le logiciel SIS Schengen et compterait quelques dizaines de milliers de personnes, éviterait que les contrôles aux frontières soient inopérants. Je rappelle que la gendarmerie a laissé filer Salah Abdeslam au lendemain de l’attentat du Bataclan alors même qu’il était connu des services belges !

La suppression des Renseignements généraux (RG), décidée en 2008 sous Nicolas Sarkozy lorsque vous étiez son bras droit à l’Elysée, n’a-t-elle pas appauvri les moyens de la police et sa capacité à repérer les terroristes en puissance ?

Cette mise en cause de la fusion entre les anciens Renseignements généraux et la direction de la Sécurité du territoire (DST) est un procès politicien scandaleux. Les «RG» étaient un service dont la vocation n’était plus en accord avec son temps. J’ai connu une époque durant laquelle ils faisaient des sondages d’opinion et assistaient à des meetings politiques... Est-ce vraiment le rôle d’un service de police dans une démocratie moderne ? Après la fusion, les effectifs des anciens «RG» ont été affectés à la DST, qui a vu ses effectifs plus que doubler. Or, l’une des principales missions de la DST est précisément de lutter contre le terrorisme.

Mais le rôle des services de renseignements territoriaux est crucial dans la lutte contre le terrorisme…

Les anciens «RG» territoriaux – environ 1 500 personnes à l’époque – n’ont pas disparu. Ils ont été réaffectés dans les commissariats de police. Depuis 2012, rien n’empêchait le gouvernement d’augmenter leur nombre s’il le souhaitait.

Comment expliquez-vous que les auteurs des attentats soient souvent «connus» des services de police mais que ces derniers ne parviennent pas à les arrêter avant qu’il ne soit trop tard ?

Soyons justes, il y a régulièrement des attentats qui sont déjoués. Mais c’est vrai que la quasi-totalité des personnes qui ont été impliquées dans des attentats en France depuis 2015 étaient des personnes «connues» des services de police. Souvent, les individus ont été suivis pendant des mois et puis, comme ils ne présentaient aucun signe de préparation d’attentats, les services ont décroché. En quelques années, la menace a totalement changé d’ampleur. A l’époque où j’étais ministre de l’Intérieur, en 2011 et 2012, quelques centaines de personnes étaient suivies. Aujourd’hui, c’est plusieurs milliers. Les services de renseignements sont forcément débordés.

Quelles solutions proposez-vous ?

Il faut que l’ensemble des forces de sécurité, police et gendarmerie, soient associées au suivi des personnes suspectées d’être des terroristes en puissance. Non pas pour effectuer des filatures ou des écoutes au quotidien, mais pour donner de temps en temps un petit coup de sonde. Par exemple pour vérifier que telle personne, qui est fichée, est bien chez elle, qu’elle n’est pas partie en voyage en Syrie. De ce point de vue, l’autonomie des services de renseignements par rapport à la police nationale, décidée en 2014 par Manuel Valls avec la création de la direction générale de la Sécurité intérieure, était une faute. Je crois enfin que les liens doivent être resserrés entre la police et la population pour que les citoyens remontent davantage d’informations aux forces de sécurité. Sur ce plan, la France pourrait s’inspirer d’Israël.

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