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L’inconnue De La Seine, Plâtre Début 20ème Siècle

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L’inconnue De La Seine, Plâtre Début 20ème Siècle
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Description de l’antiquite :

"L’inconnue De La Seine, Plâtre Début 20ème Siècle "
Vers la fin du 19éme on repêcha dans la Seine le corps d'une jeune fille noyée. C'est le début d'une histoire qui devait durer 100 ans. 
Masque en plâtre du début du 20ème siècle.
Le masque a été récemment restauré, il présentait des fentes et des restaurations anciennes en particulier dans le cou et qui on été reprises. Ce qu'on voit en léger relief aujourd'hui sur le visage est ce qu'on appelle des coutures, c'est la marque du moule qui est tout à fait d'origine.  

Un beau jour de 1880, le corps d'une jeune femme est repêché de la Seine. Aucune trace de contusions ou de plaies. On conclut au suicide. Sur son visage comme endormi se dessine un sourire énigmatique. Fasciné, l'assistant légiste décide d'en réaliser un moulage. Si la pratique est alors courante, d'ordinaire ce sont les traits d'hommes illustres que l'on fige dans l'immortalité. Pourtant voici que dans les vitrines et sur les étalages des mouleurs parisiens, entre deux bustes de Napoléon ou de Beethoven, l'Inconnue de la Seine vient de faire son apparition…
Cette mode du masque mortuaire peut aujourd'hui nous sembler incongrue ou dérangeante, mais elle fait partie de la sensibilité de l'époque.
En cette fin de XIXe siècle, c'est d'ailleurs un lieu bien particulier qui suscite l'enthousiasme des Parisiens. 
Située quai de l'Archevêché, à deux pas de Notre-Dame, la morgue est une adresse courue des citadins  qui n'hésitent pas à s'y rendre en famille pour la balade dominicale. Derrière de grandes vitres, les cadavres récupérés dans la Seine ou trouvés dans la rue sont exhibés pour une éventuelle identification.
Dans son roman Thérèse Raquin, paru en 1867, Émile Zola dresse le portrait de la foule qui s'y presse chaque jour: «La morgue est un spectacle à la portée de toutes les bourses, que se payent gratuitement les passants pauvres ou riches. La porte est ouverte, entre qui veut. Il y a des amateurs qui font un détour pour ne pas manquer une de ces représentations de la mort.»
L'écrivain naturaliste décrit un public disparate où des «bandes de gamins» côtoient des petits rentièrs et des ouvrièrs goguenardss À la foule de curieux et de curieuses se mêlent encore les femmes de la haute société venues promener leurs robes de soie et leurs regards sur les corps en décomposition comme on le ferait «devant l'étalage d'un magasin de nouveautés». Devenue attraction du Tout-Paris, la morgue figure en bonne place dans les guides touristiques jusqu'à sa fermeture au public en 1907 sous la pression du préfet.
En 1900, l'Anglais Richard Le Gallienne raconte, dans L'Adorateur d'image, l'histoire d'un jeune poète sur qui le moulage exerce une impression entêtante. Un an plus tard, lors d'un séjour à Paris, le poète allemand Rilke est lui aussi frappé par la beauté du masque exposé dans la vitrine du mouleur Lorenzi, rue Racine. Il en fait le récit dans ses Carnets de Malte Laurids Brigge, publié quelques années plus tard: «Le mouleur devant la boutique duquel je passe tous les jours a accroché deux masques devant sa porte. Le visage de la jeune femme noyée que l'on moula à la morgue, parce qu'il était beau et parce qu'il souriait, parce qu'il souriait de façon si trompeuse, comme s'il savait.»
Au fil des années 1920, le masque de l'Inconnue de la Seine fascine la mode et l'esthétique de son temps et s'arbore fièrement au mur des maisonnées bourgeoises ou des appartements de la jeunesse bohème. D'après l'essayiste Al Alvarez, qui fut un proche d'une autre suicidée célèbre de la littérature, la poétesse Sylvia Plath, l'actrice britano-autrichienne Elisabeth Bergner aurait modelé sa coupe de cheveux sur celle de la belle noyée, inspirant avec elle toute une génération de jeunes Allemandes.
La postérité littéraire de L'Inconnue connaît son apogée dans les années 1930. En France, Jules Supervielle en fait le personnage principal de l'un de ses romans, tandis qu'en Allemagne le couple de romancièrs Herta Pauli et Odo Von Horvarth s'en inspirent. Quant à l'écrivain américano-russe Nabokov, de qui l'on connaît le goût pour les jeunes héroïnes, il dédie un poème à la «plus blême et ensorcelante de toutes».
En 1933, lors de la publication de sa pièce L'Église, Louis-Ferdinand Céline choisit une photo de l'Inconnue en guise de frontispice. La rumeur voudrait qu'il s'agisse d'une jeune fille noyée trois ans plus tôt, ce qui provoque l'indignation de lecteurs et lectrices dont le courrier afflue pour rappeler que le masque est en réalité bien antérieur.
La belle anonyme séduit également les photographes Albert Rudomine, Yvonne Chevalier, Willy Zielke ou encore Man Ray, qu'Aragon contacte pour illustrer une réédition de son roman Aurélien, paru en 1944. En proie au spleen depuis son retour de la Grande Guerre, le héros éponyme trompe son ennui existentiel dans la fête, les amours sans lendemain et l'oisiveté que sa condition de rentier lui permet. Un soir, il fait la rencontre de Bérénice, une jeune provinciale qui a «le goût de l'absolu» et la trouve «franchement laide». Différé, le coup de foudre n'en saura que plus intense… À peine la jeune femme a-t-elle fermé les paupières qu'il la reconnaît. C'est elle! L'Inconnue de la Seine dont il contemple chaque jour le visage endormi sur le mur de sa chambre.
La figure de la noyée
Comment expliquer que cette fascination ait si longtemps perduré? Il faut pour cela se pencher de plus près sur la figure de la noyée qui transparaît en filigrane derrière la suicidée parisienne. À vrai dire, on ne compte plus les personnages féminins morts par noyade dans la littérature, à commencer par l'Ophélie de Shakespeare, amoureuse éconduite par Hamlet, plus tard immortalisée sous le pinceau du préraphaélite Millais et à qui Arthur Rimbaud dédiera un poème.
Plus récemment, la noyée inspire à Serge Gainsbourg l'une de ses plus belles chansons tandis qu'on la retrouve au cinéma dans le Melancholia de Lars Von Trier ou derrière le visage bleui de Laura Palmer dans la série Twin Peaks de David Lynch.
Folklores et mythologies foisonnent de sirènes et d'ondines, de naïades et de nymphes, où la femme et l'eau entretiennent une relation privilégiée et souvent funeste. Dans L'Eau et les rêves, le philosophe Gaston Bachelard fait de cette dernière l'élément essentiellement féminin, régi par un même principe de dualité: tour à tour limpide ou trouble, calme ou tempétueuse. Quant à Ophélie, il l'érige en «symbole du suicide féminin. L'eau étant l'élément de la mort jeune et belle, de la mort fleurie, et, dans les drames de la vie et de la littérature, elle est l'élément de la mort sans orgueil ni vengeance». La noyée devient l'incarnation de cette union fatale faisant de la femme une figure passive qui en quelque sorte «se laisse porter» par la mort.
Bien loin de ces tentations mélancoliques, c'est le directeur d'une entreprise de jouets, Asmund Laerdal, qui au début des années 1960 succombe à son tour au charme de l'Inconnue. Ce Norvégien qui a fait recette grâce à l'utilisation de matériaux innovants, notamment le PVC pour fabriquer ses poupées, décide un jour de plancher sur un projet de mannequin dédié à l'apprentissage des techniques de réanimation cardio-pulmonaire (bouche-à-bouche, massage cardiaque). Une raison personnelle à cela… Alors que son fils Tore était encore petit garçon, il le sauva in extremis de la noyade.
Enfant lui-même, Asmund avait été par ailleurs très touché en apprenant l'histoire de la jeune noyée, dont ses grands-parents conservaient le masque. C'est donc tout naturellement, estimant qu'un visage féminin intimiderait moins les étudiants, qu'il décide de donner à son mannequin de sauvetage, baptisé «Resusci Anni», les traits de l'Inconnue. Plus d'un siècle après sa mort, la jeune femme aura donc, destin ironique et paradoxal, permis de sauver des centaines de vie.
Aujourd'hui encore, l'Inconnue de la Seine projette son aura mystérieuse sur les artistes et les écrivains. Elle a visiblement influencé Patrick Modiano pour l'écriture de son roman Des Inconnues, de même que Chuck Palaniuk, l'auteur de Fight Club, dans son récit d'horreur À l'estomac et elle apparaît furtivement, comme un clin d'œil, dans le film qu'Agnès Varda a consacré à Jane Birkin.

 

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Antiquités Frédéric Sportis
Antiquaire généraliste du 18ème siècle au 20ème siècle.

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