2 . 2  -  Acromégalie (excès d’hormone de croissance ou GH)

2 . 2 . 1  -  Syndrome dysmorphique et diagnostic

Le syndrome dysmorphique de l’acromégalie peut amener à évoquer le diagnostic.

Les extrémités (mains, pieds) sont élargies, en « battoir », les doigts sont élargis, épaissis, boudinés et la peau de la paume des mains et de la plante des pieds est épaissie. Le patient a dû faire élargir bague ou alliance et a changé de pointure (photo 31).

Le visage est caractéristique : le nez est élargi, épaissi. Les pommettes sont saillantes, le front bombé, les lèvres épaisses, les rides sont marquées. Il existe une tendance au prognathisme (photo 32).

La comparaison avec des photographies antérieures met en évidence la transformation lente, insidieuse sur plusieurs années (à l’anamnèse, les premiers troubles de la maladie remontent généralement à 5 à 10 ans auparavant), ce qui explique que l’entourage ou le médecin traitant n’aient rien remarqué.

Si l’acromégalie est ancienne, les déformations peuvent aussi toucher le reste du squelette : cyphose dorsale, sternum projeté en avant, voire aspect exceptionnel du polichinelle.

Photos 31 et 32

2 . 2 . 2  -  Signes fonctionnels et généraux

Au syndrome dysmorphique s’associent des signes fonctionnels et généraux tels que :

  • sueurs, surtout nocturnes, malodorantes ;
  • céphalées (que l’adénome hypophysaire en cause soit volumineux ou non) ;
  • paresthésies des mains, voire authentique syndrome du canal carpien ;
  • douleurs articulaires pouvant conduire à consulter ;
  • asthénie fréquente ; il existe parfois un syndrome dépressif.


Une HTA est trouvée chez près d’un acromégale sur deux. Le patient (ou surtout son entourage) se plaint parfois d’un ronflement nocturne et l’interrogatoire de l’entourage amène parfois à évoquer un authentique syndrome d’apnées du sommeil, avec pauses respiratoires nocturnes et endormissement diurne, qu’il faut authentifier par une polysomnographie.

2 . 2 . 3  -  Complications de l’acromégalie

Les complications de l’acromégalie peuvent révéler la maladie et doivent être recherchées.

a. Complications cardiovasculaires

Observation constante d’une hypertrophie myocardique (septum et paroi postérieure du ventricule gauche) à l’échographie, avec parfois un simple dysfonctionnement diastolique (trouble de la compliance) et un débit cardiaque basal augmenté (syndrome hyperkinétique). Si l’atteinte cardiaque évolue, un tableau d’insuffisance cardiaque congestive se constitue, responsable de signes fonctionnels survenant d’abord à l’effort, puis permanents. Les complications cardiovasculaires sont la première cause de mortalité des acromégales.

b. Arthropathie acromégalique périphérique

Elle touche typiquement les grosses articulations : genoux, épaules, mains, poignets et hanche. Les arthralgies sont de rythme mécanique mais aussi parfois inflammatoire. À la radiographie, les interlignes articulaires sont élargis ; on note la présence d’ostéophytes exubérants, d’ossifications des insertions tendineuses. Le rhumatisme acromégalique touche surtout le rachis : lombalgies de type mécanique le plus souvent avec, à la radiographie, la classique spondylose d’Erdheim (coulées ostéophytiques antérieures et latérales des corps vertébraux, aspect biconcave des vertèbres et concavité exagérée du mur vertébral postérieur).

c. Diabète ou intolérance au glucose

Le diabète ou l’intolérance au glucose sont fréquents.

d. Syndrome d’apnées du sommeil

Ce syndrome est présent chez plus des deux tiers des malades. Les apnées sont obstructives ou mixtes.

e. Autres

Les goitres, souvent multinodulaires, sont fréquents.

Des polypes du côlon sont trouvés de façon plus fréquente (coloscopie régulière).

2 . 2 . 4  -  Diagnostic de l’hypersécrétion de GH

Il repose sur le dosage de l’hormone de croissance, qui doit être effectué dans des conditions particulières. En effet, la sécrétion de GH chez le sujet normal est variable dans le nycthémère : la concentration de GH est tantôt basse, indétectable, et tantôt (et cela de façon brève, durant quelques minutes) très élevée (le pic pouvant atteindre 10 à 20 ng/mL). Le diagnostic repose donc sur la mise en évidence d’une absence de freinage de la GH lors de l’hyperglycémie provoquée par voie orale (HGPO), complétée par un dosage d’IGF1 :

  • chez l’acromégale, la GH reste > 0,4 ng/mL (1 mUI/L) après HGPO, alors qu’elle s’abaisse toujours au-dessous de 0,4 ng/mL chez un sujet normal. On note même parfois une réponse paradoxale de la GH (stimulation) ;
  • la concentration plasmatique d’IGF1 est augmentée, au-dessus des valeurs normales pour l’âge.

2 . 2 . 5  -  Nécessité du triple bilan

Une fois le diagnostic établi, un triple bilan est nécessaire :

  • un bilan tumoral, afin de mettre en évidence si l’adénome responsable de l’hypersécrétion est un microadénome ou un macroadénome (cf. supra) ;
  • un bilan du retentissement fonctionnel hypophysaire de la tumeur, afin de vérifier si, en plus de l’hypersécrétion de GH, l’adénome n’est pas responsable d’une altération des autres fonctions hypophysaires (cf. infra) ;
  • un bilan du retentissement de l’acromégalie, à la recherche des complications de la maladie.
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